Bien des gens se sentent protégés et en paix en présence d’arbres. Pour Charlie Nelson, un Aîné de Bigaawinashkoziibiing, la Première Nation des Anishinaabeg de Roseau River, les arbres apportent bien plus que du réconfort : ils sont essentiels. Ils donnent des fruits et de l’ombre. Ils fournissent un abri aux humains, un habitat aux animaux et des flèches pour la chasse. Ils offrent des remèdes, des enseignements et un accompagnement spirituel. « Il faut que les gens comprennent à quel point l’accès à ces choses est important pour la vie quotidienne, souligne Charlie. Les connaître nous contribue à notre bien-être. »
Les connaissances des Anishinaabeg sur les arbres et leurs bienfaits leur viennent de l’expérience de plusieurs générations. « J’ai appris ce mode de vie de mes grands-pères et arrière-grands-pères, explique Charlie. Certaines choses se reproduisent encore et encore, et cela alimente notre savoir. » Certains Aînés savent préparer des remèdes à partir d’arbres. D’autres savent confectionner des raquettes de bois ou des canots en écorce de bouleau. Le savoir traditionnel se transmet dans des cabanes d’enseignement fabriquées avec des branches de mélèze, et aussi sur le terrain.
« Un vieil homme nous a montré les remèdes, raconte Charlie. Il nous a dit que si on était pour les prendre, on devait laisser du tabac en offrande. Les arbres sont prêts à nous aider si on le leur demande. C’est ce qu’on ressent quand on s’ouvre aux arbres; on a l’impression qu’ils nous écoutent. »
Le lien entre les Anishinaabeg et les arbres se crée dès la naissance. « Les arbres aiment les enfants, dit Charlie. Ils servent à fabriquer des berceaux. » Les arbres aident aussi les personnes âgées. « On enseigne que deux arbres sont là à attendre que les gens vieillissent pour les soutenir en cas de besoin », continue Charlie. Ce sont les canes. « On ne fait qu’un avec les arbres; ce sont nos partenaires, nos compagnons. Quels que soient nos problèmes, la nature est toute disposée à nous donner de l’amour. »
Tout comme les arbres, nous faisons partie de la nature. Si nous la détruisons, nous risquons de nous détruire nous-mêmes. C’est pourquoi Charlie souligne qu’il faut traiter les arbres avec respect et ne jamais prendre plus que le nécessaire. Son fils, Kirby Nelson, est d’accord : « Ce sont des plantes vivantes. Il faut leur dire pourquoi on leur enlève la vie et leur demander leur aide. »
Charlie et Kirby craignent que cette sagesse se perde; ils savent que la coupe de tous les arbres d’un endroit menace non seulement la forêt, mais aussi les animaux qui en dépendent. « Nous chassons le chevreuil, le coq sauvage et le lièvre, explique Kirby, et détruisons la forêt, leur demeure. » « La forêt abrite aussi l’orignal, poursuit Charlie. Cet animal nous donne déjà beaucoup; il faut donc réfléchir avant de prendre ce dont il a besoin. »
Pour Charlie et sa famille, perdre les arbres, ce serait perdre leur mode de vie. « Tout cela nous apparaît en rêve, affirme Charlie. On est si proches de la Nature qu’on voit des choses dans nos rêves et qu’on peut dire « Voilà le remède. » Nous devons en prendre soin pour qu’il reste quelque chose à nos petits-enfants.
Il faut veiller à la vérité et à la réconciliation avec la Nature. »
Vérité et réconciliation
Qu’est-ce que la réconciliation? Selon le juge Murray Sinclair, c’est « l’établissement et le maintien de relations respectueuses ».
Il faut bâtir ces relations entre les peuples autochtones et non autochtones, mais aussi entre les gens et la nature. Par ailleurs, et c’est important, la réconciliation nécessite aussi de respecter les droits constitutionnels et les droits issus de traités des peuples autochtones en préservant leur accès aux ressources naturelles essentielles à leurs cultures et à leurs modes de vie.